Abdou Sané, ancien député, coordonnateur du parti Pastef de la commune de Ziguinchor, invite les autorités à la vigilance en nommant aux postes de responsabilité ceux qui ont la double nationalité. Car, pour le responsable du parti au pouvoir, la double nationalité est un moyen pour ceux qui en bénéficient de pouvoir échapper aux conséquences de la reddition des comptes.

«La double nationalité est le fait de posséder simultanément deux nationalités. A titre indicatif, voici quelques axes qui aideraient le potentiel délinquant financier à organiser aisément sa fuite pour éviter de subir les conséquences de droit de la reddition des comptes, mais aussi de bénéficier des conditions favorables à sa future intégration sociale économique et professionnelle dans le pays d’accueil», croit savoir ce membre de Pastef. C’est ainsi que la réflexion qui se dégage chez Abdou Sané est de prendre les devants en prenant cet aspect en compte dans la nomination aux postes de responsabilité. «Pour parer à ces difficultés procédurales sources d’impunité, nous appelons à plus de vigilance dans le choix de ceux qui sont ciblés pour la conduite des affaires publiques de notre pays en redressement. La double nationalité doit être un critère déterminant dans la nomination aux différentes fonctions publiques», recommande le membre de Pastef. Il indique la voix à suivre à la Justice sénégalaise.

«Aussi, la Justice sénégalaise doit utiliser tous les moyens qu’offrent les instruments juridiques internationaux de coopération et d’entraide judiciaires pour traquer efficacement ces délinquants de haut rang. La double nationalité ne saurait être un refuge au détriment des intérêts de notre cher pays», souligne M. Sané.

En outre, il parle des avantages de la double nationalité pour ceux qui en possèdent. «La double nationalité permet l’obtention de deux passeports. Ainsi, il est bien plus facile de voyager d’un pays à l’autre sans devoir se plier à de contraignantes formalités : pas besoin de faire une demande de visa long séjour, ni de répondre à un interrogatoire sur l’objectif du voyage», argue Abdou Sané.

Ce dernier parle «d’opportunités socioéconomiques en faveur du délinquant à double nationalité dans le pays d’accueil». «Le fugitif à double nationalité a la possibilité de posséder une résidence dans chaque pays, la propriété foncière étant parfois limitée aux seuls citoyens reconnus comme tels. Quant à l’insertion professionnelle, si les étrangers doivent effectuer des démarches pour obtenir le permis de travail afin d’occuper un poste dans un autre pays, les citoyens binationaux ne rencontrent pas ces difficultés. En effet, ils peuvent chercher un emploi dans les deux pays sans restriction», affirme-t-il.
«Au plan socio-éducatif», fait remarquer M. Sané, «un citoyen binational bénéficie des droits et avantages dans chacun des deux pays : scolarité, services sociaux, accès aux soins de santé…».

«En ce qui concerne l’entrepreneuriat économique, admet-il, l’imposition et les formalités administratives présentent des facettes avantageuses pour les entrepreneurs binationaux.» Ces derniers sont «considérés comme citoyens des deux Etats», selon M. Sané qui renseigne qu’«ils ne sont pas soumis au taux d’imposition généralement plus élevé attribué aux chefs d’entreprise étrangers. Il en est de même pour les démarches à accomplir, plus simples s’il s’agit d’entrepreneurs ayant la nationalité du pays».

«En définitive, le délinquant financier ayant la double nationalité réunit dans bien des cas, les conditions nécessaires à son intégration et à son épanouissement multiforme avec les ressources indûment gagnées au détriment d’un des pays dont il se réclame patriote», rapporte le responsable de Pastef.

Au plan de la reddition des comptes, mentionne-t-il, «le citoyen à double nationalité est difficilement à portée de la Justice». «A la place de la nationalité qu’il a brandie pour accéder à la gestion des affaires publiques, le même citoyen, sûr d’être épinglé et poursuivi par la puissance publique du pays victime de ses agissements délictuels, fait valoir la deuxième nationalité pour verrouiller et freiner l’ardeur et l’éventualité de toutes poursuites judiciaires (limites des mandats d’arrêt, difficultés d’obtenir une extradition, contraintes liées aux missions rogatoires…)», note-t-il. «Ce sont là quelques difficultés à prendre en compte», selon Abou Sané, car, indique-t-il, «certains de nos concitoyens font preuve de beaucoup d’intelligence dans l’ingénierie de la sauvegarde de leurs biens mal acquis aux antipodes de la probité morale».
Par Amadou MBODJI – ambodji@lequotidien.sn