
Par Amadou MBODJI –
L’arrestation du journaliste-chroniqueur Bachir Fofana suscite une vague d’indignation. Parmi les voix qui s’élèvent contre cette garde à vue, celle de Thierno Alassane Sall (TAS), président du parti République des valeurs, se distingue par sa fermeté. L’ancien ministre de l’Energie dénonce une «dérive autoritaire» du pouvoir en place et met en garde contre la banalisation des poursuites judiciaires à l’encontre des journalistes et opposants.
Une arrestation de trop ?
Bachir Fofana a été placé en garde à vue mercredi par la Division de la cybersécurité, à la suite d’une plainte du président de l’Assemblée nationale, El Malick Ndiaye. Il est accusé de «diffusion de fausses nouvelles», après avoir affirmé que le marché relatif à l’achat de véhicules pour les députés avait été attribué à Cheikh Guèye -un homme d’affaires cité dans une affaire de corruption impliquant l’ancien ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall.
Pour Thierno Alassane Sall, cette arrestation est disproportionnée. Dans un post sur sa page Facebook, il estime qu’«un simple démenti» aurait suffi, au lieu de recourir à une procédure judiciaire. «Au tour de Bachir. A ce rythme, tout le monde va finir par y passer. La moindre incartade, qu’un simple démenti aurait redressée, vous voilà en garde à vue, avec option de séjour à Rebeuss», écrit-il.
Une Justice perçue comme un outil de répression
TAS élargit la réflexion à une dynamique plus globale de restriction de la liberté d’expression. Il rappelle que d’autres figures publiques comme l’opposant Moustapha Diakhaté ou le chroniqueur Abdou Nguer sont également détenus.
«En ce moment, un plateau spécial pourrait se tenir dans les geôles, avec Bachir, Moustapha, Abdou… en attendant les autres qui seront «effacés»», ironise-t-il. Et d’ajouter : «Voilà des ex-opposants qui avaient balancé à tous vents, mais qui se montrent implacables avec la moindre information qui dérange. Pour faire taire tout le monde ? Peine perdue.»
Alioune Tine appelle à la désescalade
La réaction de Thierno Alassane Sall trouve un écho chez Alioune Tine, fondateur d’Afrikajom Center, qui regrette la tendance à la «judiciarisation» de l’espace public. Il estime que la plainte aurait pu être évitée si l’Assemblée nationale avait opté pour une communication proactive. «Le président El Malick Ndiaye pourrait saisir ses conseillers en communication et ses conseillers juridiques pour faire un démenti, en donnant toutes les informations utiles susceptibles d’édifier l’opinion sur la transparence de sa gestion», suggère-t-il.
Un climat de suspicion grandissant
Alors que les attentes d’une rupture démocratique étaient fortes après la dernière alternance, ces arrestations répétées alimentent les inquiétudes sur la liberté de la presse et l’Etat de Droit. La garde à vue de Bachir Fofana, même si elle devait être temporaire, risque de marquer un tournant dans les rapports entre pouvoir, médias et Société civile.
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