
Au cours d’une rencontre regroupant des journalistes de nombreux pays d’Afrique, ainsi que des spécialistes en santé publique et dans d’autres domaines, Philip Morris a pu exposer les différentes innovations que l’entreprise met en place pour permettre aux fumeurs de se passer de cigarette et se rabattre sur de nouvelles alternatives offertes par le tabac chauffé, beaucoup moins nocif. Ces alternatives sont présentes dans différents pays du monde, en particulier les plus développés. Mais elles sont introuvables en Afrique, au Sénégal en particulier.
Dr Clément Diarga Basse, médecin spécialiste en question de santé publique, couvrant aujourd’hui pour Philip Morris au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Nigeria, a profité de la rencontre de Cape Town, en Afrique du Sud, pour déplorer les blocages légaux qui privent les fumeurs africains de possibilités de guérir de leurs addictions.
Est-ce qu’on peut avoir une certaine idée du nombre de fumeurs au Sénégal ?
Je peux vous dire que le nombre de fumeurs au Sénégal augmente d’année en année. Il y a quelques années de cela, on parlait d’un demi-million de fumeurs. Aujourd’hui, on parle de 660 000 fumeurs. C’est vrai que la population a augmenté entre-temps, nous sommes 18 millions au Sénégal. Et lorsqu’on rapporte le nombre de fumeurs à la population, on sent un pourcentage qui baisse. Mais cela cache un nombre en valeur absolue, qui est en augmentation. Ce qui montre que la population sénégalaise continue à fumer. Et malheureusement, c’est la seule option qui est disponible au Sénégal. On n’est pas encore à un stade où la réglementation, autant fiscale que juridique, permet d’importer différents produits au Sénégal pour donner aux Sénégalais cette alternative qui est meilleure.
On vient d’apprendre que dans la compréhension populaire, la nicotine cause le cancer du poumon par exemple. Est-ce que vous pouvez vous expliquer un peu sur ce sujet ?
Ce qui se passe, c’est que lorsque vous prenez la cigarette classique que nous connaissons tous, qu’on allume avec un briquet ou une allumette, il y a un phénomène de combustion qui se produit. Et lorsqu’on tire, on inhale de la fumée. Cette fumée contient près de 6000 produits différents qui ont été répertoriés. Et sur les 6000 et quelques produits, une centaine d’entre eux sont connus comme cancérigènes. Alors que le fumeur qui prend cette cigarette et qui tire, au bout, n’a pas besoin des 6000. Il veut la nicotine seulement. Et la recherche a pu montrer qu’on n’a pas besoin d’allumer le tabac pour obtenir la nicotine. Juste en chauffant le tabac, on peut obtenir la nicotine. D’où le premier groupe de produits qu’on appelle les heated tobacco products, les produits de tabac chauffé. Parce que quand on met de la combustion, la température monte à 650. Lorsqu’on tire et qu’on voit que l’extrémité est rouge, ça monte à 850 degrés. Alors que les produits de tabac chauffé sont des produits qui montent à 350 degrés maximum. Donc il n’y a pas de combustion et il y a une libération de la nicotine qui commence déjà. Ce qui fait qu’il y a une réduction de 6000 produits avec la cigarette classique, qui viennent à travers la fumée. Lorsqu’on passe au tabac chauffé, il y a une réduction de 90% par rapport à ces produits. C’est cette grande différence qui existe entre les deux. La nicotine a par erreur été affectée par des aspects ou des spécificités cancérigènes, ce qui est absolument faux. C’est-à-dire que les produits qui sont cancérigènes viennent de la fumée de cigarette. Et ce sont des produits qui sont connus, qui sont internationalement répertoriés. Quand vous allez sur le site de l’Oms, vous voyez tous les produits qui sont cancérigènes. L’alcool par exemple, vous allez le retrouver là-bas. Mais la nicotine n’est pas là-bas. La nicotine n’est pas cancérigène. Après, ce n’est pas un produit sans risque, parce que c’est un produit qui donne de l’addiction. C’est-à-dire qu’à un moment donné, on en a besoin. On sait que la nicotine augmente le pouls, c’est-à-dire que le rythme cardiaque peut aller plus vite lorsqu’on prend de la nicotine. La pression artérielle, lorsqu’on la mesure, peut augmenter avec la nicotine. Tout ça pour dire que la nicotine n’est pas un produit sans risque. On ne le recommande ni aux enfants, ni aux femmes enceintes, ni aux femmes qui allaitent, ni aux personnes qui ont de gros problèmes de santé cardiaque. Par contre, ce qu’il faut déconstruire et il faut disséminer clairement, c’est que la nicotine n’est pas du tout cancérigène.
Quand on parle de la cigarette, souvent, on pense aux conséquences sur le plan sanitaire. Dans quelle mesure les nouveaux produits que vous présentez contribuent à limiter ces dégâts sur le plan sanitaire ?
De manière considérable. Les produits classiques que nous avons actuellement au Sénégal, le produit classique parce qu’on n’a pas une grande variété, la cigarette classique que l’on allume, elle contribue de manière très importante, et les statistiques sont là, à tout ce qui est maladies cardiovasculaires, à tout ce qui est cancer, les différents types de cancer. Je vais parler de quelques termes techniques, ce qu’on appelle les Bpco, Bronchopneuropathie chronique obstructive, les emphysèmes. Il y a beaucoup de maladies que la cigarette contribue à amener. Et dans ces alternatives, il y a toujours la nicotine. Mais il y en a moins, c’est toute cette vague de produits toxiques qui viennent avec la fumée. Donc en mettant ces alternatives en place, on protège la personne contre ces milliers de produits chimiques que la fumée apporte. Et c’est en faisant cela qu’on arrive à changer. On a beaucoup de recherches menées en laboratoire, et des recherches menées sur des personnes volontaires. Et on a regardé les fumeurs, on les a suivis sur une période. Ils arrêtent de fumer, on voit comment est-ce que certains marqueurs biologiques dans leur sang, on analyse leur sang, évoluent.
Et on regarde lorsqu’ils reprennent, comment les marqueurs biologiques évoluent. Donc il y a une très forte présomption, et c’est ce qui a permis à certains pays comme les Etats-Unis à travers la Fda, Food and Drug Administration, d’autoriser ces produits, parce qu’ils voient qu’il y a une valeur ajoutée sur la santé. Après, pour avoir des données beaucoup plus robustes, il faudra beaucoup plus de temps sur le plan épidémiologique, mais déjà les projections et les études réalisées en laboratoire sur des souris, et des études à court terme sur des individus, ont montré qu’il y a une nette amélioration par rapport à la santé.
Vous avez parlé d’une certaine augmentation du nombre de fumeurs actuellement. Qu’est-ce qui peut expliquer cela au moment où des produits alternatifs existent, où la régulation dans nos pays africains est quand même assez forte, et même la fiscalité très élevée sur beaucoup de produits, comme la cigarette ?
Peut-être que je ne serais pas la meilleure personne pour répondre à cette question. Mais effectivement, en regardant, le premier constat, c’est que les Sénégalais, la majorité des Sénégalais, ne connaissent pas l’existence de ces produits.
Et sur le nombre de fumeurs, c’est vrai que par rapport à la stratégie de lutte contre le tabac, il y a trois grands piliers. Le premier pilier, c’est ce qu’on appelle la prévention, c’est-à-dire que le gouvernement met en place des mesures pour que les gens ne commencent pas du tout à fumer.
Donc il les sensibilise, il y a beaucoup de messages. Le second pilier, c’est ce qu’on appelle la cessation, c’est-à-dire que le gouvernement encourage la population de fumeurs à arrêter. Mais on s’est rendu compte que ça fait des années que ces deux stratégies sont utilisées, et pourtant, comme vous l’avez dit, ça n’empêche pas le chiffre d’augmenter. Pourquoi ? Parce que les fumeurs sont conscients des risques, certains vont arrêter, mais d’autres, malgré les risques, ne vont pas arrêter. Après, pour différentes raisons, ces deux piliers ne suffisent pas, d’où l’intérêt de rajouter le troisième pilier, qui est la réduction de la nocivité, le harm reduction. Pour que, si on prend un groupe de fumeurs, ou bien un groupe de population, une partie, à travers la prévention, ne fumera jamais, une partie qui fume pourra cesser à travers toutes les stratégies de cessation qui sont mises en place, mais le grand groupe qui n’accepte pas d’arrêter, parce qu’ils ont cette addictivité par rapport à la nicotine, qu’ils puissent avoir accès à des alternatives qui sont moins nocives.
Toute l’initiative de ce genre a quand même un coût. Et généralement, vous n’avez pas parlé des coûts.
Ce qui se passe, c’est que dans nos pays, je peux parler particulièrement du Sénégal, les recherches prouvent qu’il y a un impact positif. Et on a des pays où les exemples sont très parlants. Vous avez vu qu’en Afrique, les produits ne sont pas disponibles. Les pays qui sont bons et qui sont pris comme bon exemple, c’est le Japon, c’est la Suède. Je vous donne par exemple les statistiques du Japon. Lorsque les produits de tabac chauffé ont été introduits au Japon en 2014, à l’époque, le taux de fumeurs était à 19, 6%. Et dix ans plus tard, en 2024, ce taux a chuté de 19, 6% à 10%, de moitié, en dix ans. Ce qui est extraordinaire. Pourquoi ? Parce que les gens passent des produits toxiques nocifs à des produits moins nocifs. Et donc, l’utilisation de ces produits est essentielle. Et les gouvernements ont un rôle très important. Mais les gouvernements ne sont pas les seuls. La communauté scientifique, elle, est essentielle, parce qu’elle doit comprendre que ces produits existent. Elle doit comprendre comment ces produits fonctionnent. C’est notre rôle. Et si j’ai un message à laisser aux gouvernements, moi, en tant que scientifique, ce serait qu’ils écoutent plus souvent la science. Sur trois choses. La première, c’est qu’ils acceptent qu’il y ait ce qu’on appelle la continuité du risque. La continuité du risque, c’est que ceux qui fument, ils ont le risque. La cigarette qu’on allume avec la combustion, a un risque, maximum. Ceux qui ne fument pas, le risque est au minimum. Et entre les deux, il y a tous les produits qu’on a présentés aujourd’hui, qui sont des produits avec un risque moindre. Mais dont le risque est plus proche de la cessation plutôt que de la cigarette. Donc les gouvernements doivent écouter la science. Ils doivent mettre des régulations basées sur des données probantes, basées sur des évidences scientifiques. Parce que ces évidences existent. Et la troisième chose, c’est que dans nos pays, on ne doit pas confiner nos fumeurs à l’option de fumer du cigare ou de la cigarette. Parce que c’est ce qui se passe en réalité. Dans les autres pays, ils ont un large portfolio d’options qu’ils peuvent prendre. Ils peuvent prendre la nicotine, ils peuvent prendre les tabacs chauffés. Mais chez nous, soit c’est de la cigarette, soit c’est du cigare. Il faut qu’on évolue vers quelque chose qui va apporter une meilleure santé publique à nos populations.
Pourquoi en est-il ainsi ?
Parce que la législation ne le permet pas. Si on voulait rassembler beaucoup de professionnels scientifiques pour entrer dans les détails de ce qu’on a fait ici, la loi interpréterait cela comme une promotion de nos produits. Les autorités nous diraient : «Vous faites du business.» Pour eux, c’est une façon détournée de faire plus d’argent. Et donc, c’est la loi qui nous empêche de faire tout ça. Cette loi va tellement loin qu’au Sénégal, on n’a pas le droit de faire de la Rse.
Que préconiseriez-vous pour faire avancer les choses ?
Tout ce qui est dans la loi, je suis d’accord avec. On ne doit pas fumer en public. On doit éviter le tabagisme passif. Mais au moins, permettez-nous de faire du social, de la Rse. On n’a pas besoin de faire de publicité. Les gens n’ont même pas besoin de savoir que c’est Philip Morris qui a acheté des ambulances. Parce qu’au bout, ce sont nos populations qui vont en bénéficier. Au Sénégal, je fais des entretiens individuels avec des spécialistes de santé publique, des cardiologues, des cancérologues.
Recueillis depuis Cape Town Par M. GUEYE